Echec de l'adoption : préparation réaliste à l’adoption

[arche35]

Je l'ai dit sur l'autre discussion mais merci de venir échanger avec nous. Je crois beaucoup à ce mode d'information qui nous permet de discuter d'expériences vécues avant de la vivre nous-même. Et d'essayer d'imaginer la suite avec réalisme, savoir que de très grosses difficultés peuvent surgir, ne pas idéaliser l'adoption ou nier les problèmes possibles.
Quant au travail sur soi, je ne sais pas...pour certains c'est "naturel" de se remettre en question en qque sorte au fur et à mesure qu'on avance et pour d'autres non...difficile de porter cependant un regard objectif sur soi-même.

Nous sommes ici qques uns à avoir déjà des enfants, ce qui nous donne un peu d'expérience vécue au travers des années passées à veiller sur eux, à traverser parfois des périodes difficiles pour certains. J'espère que ce "capital d'expérience" pourra également nous être utile pour aborder l'accueil d'un enfant adopté.

Une chose m'a tracassée à la lecture des discussions et j'ai bien du mal à exprimer ma pensée mais disons que si une dificulté surgit chez un enfant adopté et qu'on en conclut aussitôt que c'est forcément lié à l'adoption, ne risquons-nous pas de passer à côté d'un autre problème ? Comment déterminer avec certitude l'origine de ces difficultés ? Le défi, pour nous parents (quand on est en plein dans les problèmes), n'est-elle pas de porter un regard objectif sur nos enfants adoptés ou non ?

[gagatte]

Si on juge utile de se preparer de facon specifique, que peut-on faire avant l'arrivee de son enfant ?

-Lire des livres sur l'adoption, echanger avec des adoptants, futurs adoptants, avec des adoptes me parait une source de connaissance pratique inegalable.

-Pour les parents pour la premiere fois, lire aussi des livres generalistes sur l'education et les soins d'un enfant, son developpement de 0 a l'age de l'adoption, enfin ce que certaines lisent enceinte et apres, au fur et mesure que son enfant grandit et que les questions se posent. Les parents adoptifs souvent sont parents pour la premiere fois, je leur dis toute mon admiration quand les debuts sont difficiles, et que c'est tellement de choses materielles et emotionnelles inconnues a mener de front.

-J'ajoute choisir avec soin le pays d'origine de son enfant, se renseigner des pratiques et de l'ethique en matiere d'adoption, des mentalites du pays, des raisons principales d'abandon, des conditions de vie en orphelinat ou famille d'accueil, de la preparation de l'enfant ou non des enfants, du suivi medical...

-Se renseigner des possibilites d'aide locales en cas de soucis de sante, de besoin d'aide psychologique (medecins, tissu associatif).

-Faire le deuil de l'enfant parfait, reparateur de sa propre enfance, porteur de tous ses reves, heureux, ne rencontrant aucun probleme, ca, c'est plus difficile me semble-t-il en tant que maman. On a tous des attentes qu'on le veuille ou non. Peu a peu on apprend a accepter nos enfants tels qu'ils sont, de ne pas nous renvoyer l'image de nous qu'on revait : mais comme c'est dur! Est-ce encore plus difficile avec un enfant adopte? Ou plus facile : accepte-t-on plus facilement l'echec scolaire par exemple, imputable a la vie avant l'adoption, a la genetique?

Arche parlait du "naturel", et bien oui, il faut l'admettre, certains seront des parents plus a l'ecoute, plus ouverts, plus souples que d'autres, plus aptes a se remetre en cause, et cela, parents adoptifs ou naturels : meme combat!

J'ai le sentiment qu'etre parent adoptif, qu'on le veuille ou non, demande un plus de "competence parentale"ou humaine, il faut gerer a la fois tout ce que tout parent gere (elever un enfant en tenant compte de ses aptitudes et de sa personnalite), et en plus tout ce qui tient a l'adoption (la "blessure primitive", la vie en institution, le recherche identitaire s'il y a lieu, la difference : etre adopte, ou encore de couleur dans un pays de blancs etc). Et puis il y a tout un pan de son histoire qu'on ne connait pas, combien de fois je regarde mes enfants et je me dis ; tiens, ca c'est moi, ca c'est le papa, ca c'est la grand-mere... que ce soit une caracteristique physique, de temperament ou d'aptitude. Au niveau de la sante aussi, il y a un continent inconnu quand on adopte. Ce sont encore des choses a gerer en plus en tant que parent adoptif.

Bref le metier de parent est tres difficile, le metier de parent adoptif, encore plus me semble-t-il aujourd'hui.

Enfin n'oublions pas qu'en matiere d'"echec" de l'adoption un enfant peut reussir dans une autre famille, et aussi que dans une famille ou il y a un echec, il peut y avoir deux reussites de l'adoption qui grandisssent bien... Cette pensee est tres reconfortante pour moi.

[BeaPierre]

Bonjour,
c'est une grande discussion que vous avez, je voulais juste revenir sur un point:
Gagatte, vous parlez beaucoup d'un livre que moi aussi j'ai lu "Comprendre la blessure primitive" C'est certain, dans ce livre il y a beaucoup de vérités. Mais, sincèrement, je vous invite à prendre avec mesure tout ce qui y est écrit , dans le sens où, à mon avis, l'auteur oublie ce qui est, pour moi, une des "mots d'ordre" quand on parle d'adoption: s'adapter, car chaque histoire est TELLEMENT différente... C'est à dire, qu'il n'y a pas de règle précise, il n'y a pas de passage obligé pour tous les enfants adoptés... s'avoir s'adapter c'est pout moi l'essentiel.
Je suis, moi aussi, en pleine procédure d'agrément (passage en commission en septembre...) Mais j'ai lu ce livre, non pas seulement en tant que future maman adoptive, mais aussi en tant qu'adoptée, puisque j'ai été abandonnée à la naissance, et adoptée seulement quelques jours après. Si bien je m'identifie avec beaucoup de choses dans ce livre, il y a quand même un fil conducteur qui me dérange, certains ont déjà parlé de ça.... Je me résiste à être cataloguée, et à entendre dire que forcément, je vais sentir cela, me comporter ainsi, etc.... Je crois quand même qu'il y a certains sentiments, certaines "blessures intérieures" propres aux adoptés, mais sincèrement, je trouve ce livre assez fermé et même, des fois, déstabilisant. Non pas parce que je ne veuille pas regarder certaines choses en face,non, ( vous savez, j'ai parcouru un long chemin, pas toujours facile, pas toujours difficile...) mais parce que je me résiste à croire qu'il y a un "passage obligé" pour tout enfant adopté, abandonné. Sincèrement, le livre (sans oublier que ce sont 2 livres bien différents) "Au risque de l'adoption" est un livre beaucoup plus ouvert et CONSTRUCTIF.

Personnellement, pour moi l'essentiel, c'est de garder un esprit ouvert, et de savoir S'ADAPTER....
Amicalement,

Bea


Beatriz, maman de 4 petits "faits maison" et en cours d'agrément...

[arche35]

Il est normal d'avoir des points de vue tous différents sur cette question car chaque histoire est et sera différente mais je rejoins totalement Bea sur sa façon de voir les choses car adoptés ou pas, les enfants ont tous des besoins différents auxquels il est très important de savoir s'adapter.
Par ailleurs l'étiquette "adopté" collée sur le front des enfants et censée résumer tout ce qu'ils sont ou ressentent me gène énormément. Ce que je ressens (mais l'avenir seul dira peut-être si j'ai tort ou raison) c'est que l'adoption est une caractéristique (dont il faut tenir compte) parmi beaucoup d'autres.
J'ai cinq enfants et ils sont TRES différents les uns des autres à TOUS points de vue. J'ai essayé de m'adapter à chacun. Je m'attends donc forcément à ce qu'un enfant adopté soit TRES, TRES différent de ses frères et soeur. Mais il est possible aussi qu'il ait des points communs avec certains d'entre eux, qui peut savoir ...

Pour l'anecdote, il y a qques années, sur une photo de famille, des collègues m'ont fait remarquer une grande ressemblance entre mon fils et l'un de ses cousins. Il se trouve que mon neveu étant adopté il n'y avait aucun lien "biologique" entre eux

[BeaPierre]

En parlant des ressemblances, c'est assez souvent que des gens, qui ne connaissent pas mon histoire, me disent que je ressemble à ma mère... adoptive bien sûr!!
Mais il y a une certaine vérité dans ces commentaires, car, forcément, après avoir grandi dans ses bras, après avoir passé tant d'années ensemble, à partager tellement de choses (rires et disputes, bonheur et crises, méfiances et confiance...) , forcément il y a des gestes, une façon de parler, des expressions ... qui se sont façonnés ensemble...
Cela me fait toujours sourire, et je réponds innocemment: "ah, bon!" et je continue de sourire mystérieusement...

Bea

[Cloclo]

Une petite histoire :
" Un mari, toujours très amoureux de sa femme, réfléchit sur le cadeau qu'il pourrait lui faire pour ses 70 ans. N'ayant plus aucune idée, il ose lui poser la question :
" Ma chérie, pour la première fois, je suis à court d'idée et je ne sais plus quoi t'offrir pour te faire plaisir. Dis-moi, très franchement, ce qui pourrait te faire le plus plaisir ? "
La femme réfléchit quelques secondes et dit :
" Le meilleur cadeau que tu pourrais me faire pour mon anniversaire, c'est celui-ci :
au moins une fois dans notre vie, j'apprécierai que tu ne m'apportes plus le petit déjeuner au lit "

Rapport avec l'adoption, les attentes des enfants adoptés, les impressions de bien faire des parents, à vous de vous faire votre opinion ?

Regardez le documentaire "De l'enfant rêvé à l'enfant réel" et vous allez y trouver des analogies, dans les divers témoignages, avec cette histoire.

[arche35]

Je crois qu'il nous arrive à tous de penser bien faire et d'être complêtement "à côté de la plaque"... tant qu'on est conscient que ce qui nous parait "bien" ne convient pas forcément à l'autre, on conserve un espoir de s'améliorer, non ?

[yvonne]

Je me demande ce que signifie réellement préparation réaliste à l'adoption.Je me pose aussi la question de la lecture de tant de livres qui peuvent angoisser terriblement et même nous enfermer. Le fait suivant m'interroge : dans les nombreuses familles adoptives dans lesquelles les enfants sont désormais adultes des problèmes importants se sont manifestés pour l'un des enfants et pas pour les autres alors que les parents étaient les mêmes et que les enfants étaient arrivés dans les mêmes conditions au même âge . Parfois il s' agissait de frères et soeurs bilogiques.Cela existe aussi dans les familles biologiques mais la fréquence des problèmes est moins grande ( 10 % pour les enfants biologiques et 30 % pour les enfants adoptés ).
Je n' ai pas relevé de grande différence entre des enfants arrivés à 2 / 3 mois et des enfants arrivés à 2 voir 5/ 6 ans.

Le souci majeur qui à mon avis dépasse la préparation réaliste à l' adoption est le peu d'aide adaptée que l'on trouve en france en cas de problème . Les recettes des livres ne sont pas toujours d'un grand secours , nous en avons fait l'expérience .

[gagatte]

En ce qui concerne le suivi, je remarque un paradoxe chez les adoptants : ils sont a peu pres la moitie a ne pas vouloir enfermer leur enfant sous une "etiquette" d'adopte, refusant l'idee qu'avoir ete abandonne et adopte soient des caracteristiques plus marquantes que d'autres (je comprends le raisonnement qui part d'un bon sentiment), mais des que les difficultes arrivent, la majorite des adoptants sont a la recherche d'un psy specialise dans l'adoption (car, je cite, les psy en general ne comprennent rien aux specificites des adoptes et ne les ont donc pas aide)... Etonnant...

Les livres et les albums de jeunesse peuvent aussi un formidable outil pour la communication avec les enfants. Cela ne veut pas dire que toutes les reponses sont dedans, la encore, bien evidemment, mais on aurait tort de s'en priver!

[sand33]

Désolée, je ne vois pas le paradoxe : ne pas vouloir stigmatiser l'enfant en tant qu'adopté ET chercher de l'aide quand une difficulté survient, c'est plutôt bien, non ?
Finalement, tout le monde a un peu raison : s'informer, s'adapter, se faire aider !
Sandrine