questionnement de nouveaux parents

[sand]

Bénoni, je n'avais pas vu votre dernier message.

"Je reste néanmoins convaincues que les chiffres ne reflètent pas toujours la vérité et ce pour d'autres cas que l'adaptabilité des enfants. " OK, les chiffres sont toujours à prendre avec précaution.

"On nous dit ce que l'on veut bien nous dire ou nous faire croire, et ça c'est une certitude qui m'est propre (expérience personnelle) et pourtant beaucoup me rejoignent.C'est un prétexte pour justifier certainement la difficulté et la longueur d'adoption."
Vous en êtes au tout début de la réflexion de votre projet. Les réunions au CG, les réunions EFA, les ouvrages sur l'adoption, les conférences avec des témoignages et des spécialistes : tout le monde est unanime, l'adoption internationale change, les procédures d'adoption nationale augmentent dans de nombreux pays( comme la Colombie, le Brésil, le Mexique, la Pologne etc... la liste est longue de ces pays qui étaient auparavant des terres d'adoption et qui aujourd'hui ne proposent à l'internationale que des enfants grands, en fratrie ou avec des besoins spécifiques). Et cette progression de l'adoption nationale des enfants dans leur propre pays est une avancée qui n'aura pas de retour en arrière.

Maintenant la longueur des procédures?
Lors d'une réunion de notre CG, une future maman adoptante interpelle une responsable de l'EFA et lui dit : "Mais ces délais hyper longs après l'agrément, n'est-ce pas anormal? N'est-ce pas un prétexte pour ne pas qu'on adopte?"
Réponse de la responsable EFA( maman adoptive de 3 enfants) : A notre époque, on pouvait partir avec son petit sac au dos au Vietnam, dans de nombreux pays d'Afrique et on revenait avec un enfant en une semaine. Je ne vous explique pas les désastres que de telles pratiques ont pu engendrer. Il y 20 ans, elle et son mari avaient fait le choix de démarches longues, alors qu'ils auraient pu choisir une autre solution, mais l'éthique était pour eux primordiale.
Alors des chiffres bas pour "justifier la difficulté et la longueur d'adoption"? C'est plutôt le contraire! LA difficulté et la longueur d'une démarche d'adoption expliquent les chiffres bas.
Franchement, je ne crois pas qu'il faut y voir une manoeuvre de l'Etat français. Surtout qu'en matière d'adoption internationale, la France n'est pas maîtresse des règles du jeu et doit se soumettre aux règles des pays. Et avec la Convention de la Haye, désormais appliquée dans de nombreux Etats, il est vrai que les délais se sont nettement rallongés, mais dans l'intérêt d'une adoption éthique et réglementée.

[bénoni]

Je pense comme toi Sand, sur le fait que les couples avec enfants sont certainement plus ouvert, et même si déjà nos enfants ont leurs propres difficultés.
Peut-être justement par expérience des difficultés et ce que ça implique; mais en étant franche comme pour des grossesses normales on souhaite tous avant tout des enfants en bonne santé. Et c'est humain !

Ce qu'il faut admettre je crois c'est que cet enfant même en bonne santé, peut présenter des troubles d'adaptation, même au sein d'une famille aimante, parce qu'on son histoire est inscrite en lui. Comme elle est inscrite pour les enfants biologiques de la conception à la naissance.
En fait on adopte pas un enfant comme on achète un machine à laver, il n'y a pas de SAV.

Tout enfant quel qu'il soit peut présenter une maladie, des troubles du comportement...à n'importe quel moment de sa vie.
Ce n'est pas prévisible et en tant que parent, on se doit de l'assumer, l'accepter et le gérer. Quoiqu'il en coûte sur le plan émotionnel que matériel.

BIO OU ADOPTER ON A PAS LE MODE D'EMPLOI !

[bénoni]

NB : pour ce qui est de nous faire "croire ce qu'ils veulent", je me suis mal exprimée, ce n'était pas dirigé sur l'adoption.
Mais bien sur des expériences autres, dont je ne parlerais pas là, car ce n'est pas le sujet. Et qui du coup me laisse songeuse sur l'adoption.
Et effectivement concernant les chiffres il ne faut qu'être prudent et ce pour les mêmes raisons.

[sand]

Décidément, cette discussion nous entraîne loin!

"comme pour des grossesses normales on souhaite tous avant tout des enfants en bonne santé"
Hum, justement ce n'est pas une grossesse normale, c'est faire le choix d'un enfant qui ne sera pas comme celui qui était sorti de notre ventre. Cet enfant ne ressemblera pas forcément à celui de nos rêves, à celui de notre désir : + grand, + malade, pas forcément celui qu'on avait imaginé au départ. Je crois que c'est pour cette raison que les psy insistent tant sur le deuil de l'enfant bio dans les entretiens d'agrément. Et quelquefois, il y a un 2e deuil à faire quand on s'aperçoit que la notice de l'agrément (qui correspond à notre désir) ne correspond pas aux réalités de l'adoption (nationale et internationale)

"BIO OU ADOPTER ON A PAS LE MODE D'EMPLOI !" : en effet, ce qui fait qu'il est tellement difficile d'avoir des positions tranchées en matière d'adoption, tant des témoignages peuvent être opposés. Le mode d'emploi d'un enfant adopté est cependant particulier. Comme l'a dit une psychologue lors d'une conférence, il faut savoir discerner ce qui relève de la problématique de l'adoption mais ne pas non plus tout rapporter à cela lors du développement de l'enfant.

[Patricia01]

Allez, juste un petit témoignage..
Quand on a adopté notre première puce il y a 3 ans, j'avais un besoin vital de pouponner, je me suis battue pour être acceptée par des OAA intervenant dans des pays où il y avait des bébés à adopter (je n'avais que 31 ans au moment de l'agrément, mais mon mari 43, ça nous a fermé des portes). Je me rappelle bien combien je leur en voulais, à l'époque, quand toutes les portes se fermaient, à ces parents d'enfants bios qui voulaient eux aussi un bébé. Je me disais "mais s'ils veulent à tout prix un bébé, ils ont qu'à le faire, puisqu'ils peuvent! s'ils veulent adopter, offrir une famille à un enfant, qu'ils le fassent pour les enfants qui en ont le plus besoin..." (finalement je me retrouvais bien dans la position de cette dame de MdM) Concernant l'ouverture aux problèmes de santé, on a hésité, mais on voulait déjà "apprendre à être parent" sans forcément compliquer les choses. Et on culpabilisait de ce manque d'ouverture ("de quel droit on refuserait un gamin sous prétexte qu'il a un petit souci ?") Sarah est arrivée d'Ethiopie, à16mois, en théorie sans souci particulier. Avec le temps sont apparu retard de langage, problèmes de psychomotricité fine... 2 séances d'orthophonie et une de psychomot par semaine... Finalement, elle était "à besoins spécifiques" !
Pour la deuxième, mon envie de pouponner était encore très forte, presque exacerbée car j'en profitais à fond avec Sarah encore petite. Par contre, on s'est trounés directement vers le projet d'enfant "à petit plus". pour ceux qui débutent seulement les démarches, sachez que ce n'est pas forcément un gros handicap! Dans le cas de notre deuxième, adoptée via MdMà l'âge de 11mois, elle est porteuse du virus de l'hépatite B, mais en pleine forme, très éveillée, aucun souci ! Il peut également s'agir de fente labio-palatine, de cardiopathie, de doigts en moins ou en plus, d'un membre en moins, d'anomalies sanguines qui fragilisent (dropanocytose par ex), de grosses allergies, d'asthme... et j'en passe ! Par contre, si vous adoptez en France via Enfance en recherche de Famille, spécialisés dans la recherche de parents pour enfants "moins demandés", dirons-nous, il s'agit de pathologies nettement plus lourdes. A chacun de voir selon ses limites... A bien réfléchir en tout cas !

Et si un jour on devait adopter un troisième... et bien mon envie de pouponner a fini par être moins pressante, et cette fois-ci je me sentirais prête à adopter un enfant plus grand, simplement dans le but de lui offrir une famille tout en agrandissant la nôtre... Donc on va attendre 4-5 ans que nos puces grandissent, et on verra à ce moment-là... De toute façon on n'aura plus aucune chance d'adopter un enfant petit vu nos âges, on le sait... et ça nous est égal maintenant, on a eu déjà deux "bébés", on mesure notre chance !

Tout ça pour dire que les envies, les attentes évoluent, pour une même famille. Mais je confirme qu'il est très difficile, vu la réalité de l'adoption internationale, d'adopter un tout-petit de moins de 2-3 ans quand on a déjà des enfants bio. Ca se fait encore en Ethiopie, si une OAA vous accepte (et faut pas trop traîner, pour l'instant vu vos âges ça passerait). Ou peut-être au Vietnam ? (en train de changer ses procédures donc tout peut changer... et surtout il y a énormément de demandes pour ce pays)

Bon courage dans votre réflexion, dans votre cheminement. Vous verrez durant votre agrément, vous verrez également si vous allez à des réunions EFA. Réfléchissez sereinement à vos limites en matière de santé, demandez conseil à vos médecins. bref... vous avez tout le temps du murir votre projet, en vous confrontant à la réalité actuelle !

[bénoni]

Merci Patricia pour ton témoignage, très émouvant.

Comme j'ai essayé de le dire précédemment : il est effectivement normal d'espérer avoir un enfant en bonne santé et ce pour tout le monde, je ne pense pas être la seule a avoir intimement ce sentiment là.
Et c'était bien une façon d'exprimer que je comprends les parents stériles d'aller dans cette direction, mais aussi pour leur dire que même si ce bébé est en bonne santé au départ, il y a malheureusement parfois des "surprises". C'est une réalité.

Lors de mes deux grossesses, j'espérais et rêvais comme toute maman "à mon bébé idéal", mais ce bébé idéal n'existe pas.
Il n'est que fantasme...un peu comme l'homme idéal
Dès la naissance de mes enfants j'ai rencontré les inquiétudes d'une jeune maman, bébé en souffrance direction unité kangourou...et puis on dépasse ça, parce qu'on constate que finalement il y a pire que nous. Finalement bébé va bien, grandit bien et puis...trouble du comportement et oui, comme je le dis il n'y a pas de mode d'emploi, on ne s'attend pas toujours au diagnostic que l'on nous fait (plus ou moins grave), mais on est parent avant tout et l'on fait tout pour lui.

Alors même si on me proposait un enfant à petit plus, je sais à quoi m'en tenir..., je suis secrétaire médicale à la base (dans différent service hospitalier) et je commence dès octobre une reconversion professionnelle de deux ans pour devenir praticienne en relaxologie et sophrologie et je me destinais à l'origine à l'enseignement dans un IME. Aussi je pense connaître mes limites concernant un handicap ou pas.
Si j'ai la chance que l'on me donne le droit d'adopter, ce sera bien évidemment en prenant TOUT, et en faisant le nécessaire à cet enfant d'avoir une vie agréable, s'il devait y avoir de la chirurgie ou des soins particuliers et bien je n'ai pas a réfléchir à ce que je vais faire ou pas, c'est une évidence ! Comme mes enfants je ferais tout pour lui.

[Delphine]

Comme j'ai essayé de le dire précédemment : il est effectivement normal d'espérer avoir un enfant en bonne santé et ce pour tout le monde, je ne pense pas être la seule a avoir intimement ce sentiment là.
Et c'était bien une façon d'exprimer que je comprends les parents stériles d'aller dans cette direction, mais aussi pour leur dire que même si ce bébé est en bonne santé au départ, il y a malheureusement parfois des "surprises". C'est une réalité.
[...]
Alors même si on me proposait un enfant à petit plus, je sais à quoi m'en tenir...

Personnellement, notre projet d'adoption est exclusivement tourné vers un enfant "à petit plus". Notre enfant rêvé, parfait à nos yeux, a forcément un petit quelque chose qui fait que beaucoup de couples ne s'imagineraient pas en faire leur enfant... (ce "petit plus", ça peut être l'âge, le vécu, un handicap, une maladie...)
Nous avons construit notre projet d'adoption en connaissance de la réalité de l'adoption (nationale et internationale) et ne voyons pas l'intérêt de postuler pour un enfant jeune, sans handicap et en bonne santé...
Nous n'espérons même pas adopter un tel enfant ! Non pas que ce serait impossible (en Ethiopie ce serait possible), mais puisque nous sommes ouverts et prêts à faire avec des particularités, pourquoi ne pas totalement nous engager dans ce projet et permettre ainsi à un enfant "plus difficile à placer" de trouver une famille ?

Le type de projet "nous sommes ouverts à des petites particularités mais nous espérons un enfant en bonne santé" est celui de postulants qui ne sont pas réellement désireux d'avoir un enfant à petit plus...
Or, pour son programme d'adoption d'enfants à besoins spécifiques, l'AFA vérifie que le projet des candidats est complètement orienté vers une telle adoption. C'est aussi le cas des OAA.
Pourrait-on prendre le risque qu'un couple soit déçu de se voir attribuer un enfant trop loin de leur enfant rêvé ? Comment pourrait-il l'adopter ?

C'est le même problème qu'avec la tranche d'âge : combien de couples demandent une tranche d'âge large "pour aller plus vite" tout en espérant adopter un tout-petit !

[gagatte]

Comme Delphine nous nous sentons completement porte vers un enfant special, on n'en imagine pas un autre. De la meme facon nous ne nous projetons pas avec un tout petit bebe. Apres comme tout parent on souhaite qu'il ait une longue et belle vie, ca ca ne change pas . Ce qui me semble different, c'est qu'avec un enfant bio, la maladie (la difference) nous tombe dessus et apres on l'assume. Dans le cas de l'adoption, on la choisit en connaissance de cause, avec la possibilite de poser des limites (en restant conscient qu'on ne sait pas ce que demain nous reserve comme surprise, la particularite peut s'averer plus lourde que prevu, ou plus legere, il y a une part de risque a accepter).
Merci a toutes pour cette discution qui me fait encore reflechir .

[bénoni]

Delphine et Gagatte,

C'est bien le même discours que je tiens, je répondais simplement à un échange plus haut faites sur les couples stériles où j'évoquais leur désir légitime d'un bébé; et j'expliquais que comme tous parents au départ on souhaite le bébé idéal et en bonne santé.
En quoi celà est-il inacceptable?
Quel parent bio n'a pas idéalisé son bébé? Espéré qu'il ne soit pas malade?
Pourquoi en serait-il différent pour des parents stériles?

C'est bien après une grande réflexion que l'on achemine notre projet dans le désir unique d'un enfant quelqu'il soit.
Le désir du premier enfant nait du fantasme d'un mélange de nous. Et lorsque l'on fait le deuil du bébé bio le cheminement est bien compliqué et effectivement comme il était évoqué plus haut, on peut comprendre la "colère" (c'est un grand mot) de ces parents vis à vis des parents bios qui veulent aussi adopter.

C'était au départ mon inquiétude, une forme de culpabilité de prendre la place de ces parents sans enfants.

Pour être claire, on n'envisage pas non plus un bébé, mais bien plus un enfant plus grand pour qu'il puisse partager les jeux avec nos deux enfants, comme dit mon ainé je rêverais que l'on soit trois.
Et puis à vous lire, j'ai pris conscience qu'au regard du temps de l'adoption, mes enfants auront grandit eux aussi.
Dans 4 ans mon dernier aura 10 ans, alors...

Gagatte tu dis que "dans le cas de l'adoption, on la choisit en toute connaissance de cause..." c'est d'autant plus vrai lorsque notre projet à été dans ce sens, mais en tant que maman qui a eu la surprise 4 ans après la naissance de notre ainé de le voir changé du tout au tout, je sais que trop bien que la vie nous réserve effectivement bien des surprises.

Alors oui, grace également à nos échanges ma réflexion évolue dans ce sens : un enfant spécial pour une famille spéciale.