Bonjour !
Eh bien, chacun a sa propre implication, chacun vit la procédure à sa façon. Personnellement, quand j'étais en démarche d'adoption, j'avais la tête dans le guidon. Chaque jour je venais sur les forums, les sites, à l'affut de la moindre petite information non significative... il FALLAIT que je sache, c'était vital !!!
A tel point que quand notre première adoption a abouti avec l'arrivée de notre fille... j'ai dû faire une sorte de "deuil de la procédure" : la projection et le rêve devaient laisser place à l'enfant réel, et ça n'a pas été facile.
En fait, j'envie ceux qui arrivent à se détacher de l'attente ! Ceux qui arrivent à conserver une vie normale alors que leur dossier est dans un bureau à l'autre bout du monde...
De son côté, mon mari s'est laissé porter. Il n'est pas du genre à se projeter (
carpe diem)... Il n'a commencé à se plonger dans des bouquins que quand on a été acceptés par notre OAA !

Heureusement que j'étais là pour mener la barque sinon on n'aurait jamais abouti.
Sinon, concernant nos expériences :
Premier agrément obtenu en mai 2005 ; nous avions une fille biologique, qui n'avait que 11 mois à la réception de l'agrément. Notre projet portait sur un enfant plus jeune qu'elle, pouvant présenter une particularité "réversible". Nous avons été acceptés par un OAA, pour l'Ethiopie, et avons adopté notre deuxième fille en septembre 2006, soit 16 mois après l'agrément. Notre petite puce avait 11 mois et une très légère particularité.
Deuxième agrément reçu en août 2014. Entre temps nous avons eu un fils biologique ; à la réception de l'agrément nous avions donc 3 enfants, âgés de 10 ans, 9 ans et 18 mois ! Notre projet était à nouveau pour un enfant plus jeune, et avec une ouverture sur les particularités un peu plus large que lors de notre première démarche : nous étions ouverts au VIH et hépatites, aux malformations ou agénésies de membre, paralysie partielle, handicap sensoriel appareillable. Avec une limite à l'autonomie et la possibilité d'une scolarité "classique".
Dès réception de notre agrément nous nous sommes tournés vers l'AFA, pour la Chine. Nous avons adopté notre petite quatrième en novembre 2015, soit 15 mois après l'agrément. Notre fille avait 25 mois et présente ce qu'on appelle une "inconnue de développement" à cause d'un passé médical lourd, mais en fait, elle est en parfaite santé et a un développement tout à fait normal.
Marsim76 a écrit :
Puis, courrier envoyé à l'ASE en octobre, nous avons assisté aux réunions, nous avons le dossier de demande d'agrément depuis février, mais depuis... nous en avons très peu parlé, pas le temps? Pas eu l'occasion? Pas l'envie?
Je pense que nous sommes chacun de notre côté dans notre cheminement.
Plein d'interrogations (pupille de l'état et/ou international, besoins spécifiques...), de peurs (équilibre familial, échec de l'adoption, agrément sans issue...), culpabilité (par rapport aux demandes de couples n'ayant pas d'enfant, comparé au nombre d'enfants en attente d'une famille...)
Je pense que ce questionnement est nécessaire, mais me semble long, et peur que cela devienne un blocage, qu'il devienne stérile avec le temps.
Vos questionnements et doutes me semblent une preuve de lucidité... que tout le monde n'a pas, moi la première ! Je vivais en "mode bisounours" avant l'arrivée de notre première fille adoptive. J'avais lu sur le sujet des adoptions difficiles, mais je ne pouvais pas m'empêcher d'idéaliser ce que serait NOTRE adoption. Je vivais cette démarche d'adoption comme une évidence, je ressentais un tel amour pour ce futur enfant !
Or, c'est justement sur nous que ce sont abattues les difficultés d'attachement. Dans les deux sens : notre fille nous repoussait - elle repoussait tout contact, avec qui que ce soit -, et moi de mon côté j'ai mis du temps à l'accepter pleinement comme ma fille. Je me suis souvent dit qu'il aurait peut-être mieux valu pour elle de tomber dans une famille sans enfant, qui n'aurait pas pu faire de comparaison, et surtout qui aurait eu toute la place pour elle. Cette première adoption difficile nous a bien remis les pieds sur terre et beaucoup fait réfléchir avant de commencer une deuxième procédure... Avec des moments de doute et même d'angoisse, que je n'avais pas connus lors de notre première démarche.
Culpabilité par rapport aux couples sans enfant ? Non, d'une part parce que je suis convaincue que nous sommes une "famille suffisamment bonne" (comme le dit Winnicott) pour y accueillir un enfant (et en plus, pour certains enfants, la présence de grands frères/soeurs est un atout, c'est le cas pour notre petite dernière) et d'autre part parce que nos projets ont été orientés dès le départ vers des enfants plus difficilement adoptables. Le "monde de l'adoption" se charge de favoriser les couples sans enfant : impossibilité pour nous, déjà-parents, d'adopter un pupille de l'Etat (à moins d'avoir un projet très ouvert) et refus systématique de la grande majorité des OAA. (Un OAA m'a quasiment raccroché au nez quand j'ai dit que nous avions déjà 3 enfants. Peu importait nos ouvertures !)
Marsim76 a écrit :
J'en ai parlé un peu plus avec ma sœur, avec qui je suis très proche, surtout au retour des réunions. Elle m'écoute mais ne se prononce pas, et c'est vrai que sa première réaction trotte un peu dans la tête " mais pourquoi chercher les difficultés, alors que vous avez déjà une belle petite famille recomposée, ce qui n'est pas donné à tout le monde" .....
Chez nous aussi c'était LA question : mais pourquoi ??? Eh bien... Pourquoi pas ? Cette façon d'agrandir la famille nous paraissait tellement naturelle, tellement humaine tout simplement. Ceci dit, j'avoue que dans les moments vraiment difficiles, je me la pose aussi cette question ! Si nous n'avions pas opté pour l'adoption, ça nous aurait épargné bien des soucis (et je compte ceux à venir aussi

). On trouvera toujours quelqu'un qui dira "mais avec les enfants biologiques aussi c'est compliqué"... sauf que non, ça n'a rien à voir. Mais parallèlement, quelle richesse ! J'en ai plus appris sur moi à travers ces adoptions que je ne l'aurais fait par une psychanalyse... Mes forces et surtout mes faiblesses ont été révélées au grand jour...
Marsim76 a écrit :
Pour les besoins spécifiques, on travaille dessus, les particularités physiques ne posent aucun souci, pour le reste.., on réfléchi, peur d’être influencé, par rapport, au désir d’accélérer ou de rendre réalisable ce projet, et le fait que nous sommes du milieu médical et paramédical. Ce qui est certain pour le moment, les particularités physiques ne nous posent aucun souci, le regard des autres non plus, pour le handicap sensoriel non plus, mise à part se renseigner sur les services en terme de suivi autour de chez nous, pour la qualité de vie de nous tous (nous sommes en campagne). Et,nous souhaitons l'autonomie à l'âge adulte (pour préserver ses frères).
Mais, comment être certain d'assumer au quotidien?? tant que nous n'y sommes pas confrontés, et c'est étrange de faire ce choix, alors qu'évidemment cela arrive à quiconque sans être préparé, alors même en se préparant, peut-on être vraiment prêt tous les jours??
J'avais recueilli pas mal de témoignages de parents adoptants, cela m'avait beaucoup aidée à déterminer ce qui collerait avec notre famille. Alors que ce projet de deuxième adoption me titillait, j'étais en contact avec une maman qui avait adopté un enfant né avec des amputations congénitales et ça m'a sauté aux yeux que ce type de projet me correspondrait tout à fait. Ce n'était pas "pour aller plus vite", même si je savais bien qu'une ouverture de ce type nous ouvrirait des portes !
De son côté, mon mari était ouvert quasiment à tout, sauf au handicap mental. Mais il faut dire que ce n'est pas lui qui gère les conduites, en cas d'hospitalisations / opérations / rééducation / suivi médical / bilans de santé... Avec d'autres enfants à gérer au quotidien, ça m'avait poussée à mettre de côté certaines particularités...
Quand vous réfléchissez aux particularités médicales, vous pouvez vous poser une question, qui vous permettra de faire le tri entre ce que vous acceptez pleinement et ce qui vous êtes "tentés d'accepter pour vous ouvrir des portes" :
"Si demain on m'appelle pour un enfant présentant cette pathologie, vais-je bondir de joie ou prendre peur ?"
Voilà ce qui me vient en tête pour le moment ! (seulement ça ?

)
Delphine