Comment rassurer un enfant adopté ..?

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sterita
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Enregistré le : mar. 21 nov. 2023 16:34

Comment rassurer un enfant adopté ..?

Message non lu par sterita »

Bonjour à tous et à toutes, :)

Je me présente, je m'appelle Sarah, j'ai 27 ans et ma cousine, Lila, qui est en 5ème cette année, est comme une petite sœur pour moi. Elle habite à l'autre bout de la France mais nous nous voyons pendant toutes les vacances. Et depuis qu'elle est toute petite, je l'ai toujours considérée comme bien plus que ma petite cousine, nous avons toujours été très proches et nous sommes toutes les deux un peu comme des sœurs l'une pour l'autre.
Elle est arrivée dans la famille très jeune, ma tante a eu beaucoup de chance car dans le pays où elle est allée, elle a pu rencontrer une femme qui allait avoir un bébé et qui souhaitait le, oula, faire adopter. Elle a donc elle l'immense privilège d'être présente dès les premiers mois de Lila, et s'occuper d'elle, en présence de sa mère biologique, dès qu'elle a pu se rendre chez elle, avant d'avoir finalisé la procédure d'adoption et avoir pu l'emmener avec elle, dans leur maison.

Aujourd'hui, Lila est donc une petite fille très gaie, très gentille, très dynamique. Cependant, j'ai beaucoup de mal pour l'aider à avoir confiance en elle, et à d'autres niveaux. Je m'explique; non seulement elle est donc une petite fille qui a été adoptée, chose que sa maman lui a expliqué il y a déjà de cela quelques années. Mais en plus elle n'a pas la même couleur de peau que nous, sa famille, et elle n'a jamais eu de figure paternelle, car ma tante l'a adoptée seule, et n'a donc jamais eu de compagnon, ni au moment de l'adoption, ni après et jusqu'à présent.

J'aimerais donc savoir si plusieurs d'entre vous auriez quelques bons conseils à me donner, pour l'aider à avoir plus facilement confiance en elle, et à se sentir plus facilement en osmose avec nous, sa famille. Car elle m'a déjà fait part, à plusieurs reprises, de sa confusion surtout par rapport au fait de ne pas avoir de père, par exemple en me disant dans une de ses lettres, que son père lui manquait... ou encore, très souvent, par rapport à sa couleur de peau, et donc de son type de cheveux, qui ne sont pas les mêmes que les nôtres mais aussi que ceux de la grande majorité de ses camarades de classe... Elle m'a aussi déjà parlé quelques fois du fait qu'elle est "fière" du pays d'où elle vient, alors qu'il est évident qu'elle ne sait rien de ce dernier, ni rien à ce propos.

Cela dit, ma difficulté réside dans le fait que je ne sais pas trop si ses complexes relèvent de ceux que tout le monde a plus ou moins pendant l'adolescence, ou si ceux qu'elle a sont majoritairement dus au fait qu'elle soit une enfant adoptée, de couleur de peau différente de tout ceux qui l'entourent et donc de toutes les personnes qu'elle affectionne le plus et/ou admire, etc, et au fait qu'elle n'ait pas de père (donc elle n'est encore une fois pas comme tout le monde)... ou si ce sont des complexes sensées être "normaux", et qui sont dans son cas anormalement symptomatiques voire pathologiques car ils sont vraiment très exacerbés à cause de ses origines et ses réalités familiales qu'elle n'arrive pas à accepter ou que sais-je...
Je vous en serais donc à tous, vraiment vraiment, très reconnaissante, si vous pouviez m'aider au maximum, pour savoir ce que je peux faire, ce que je peux lui dire, ce que je peux lui expliquer ou lui inculquer à court ou surtout à long terme, pour l'aider à avoir confiance en elle, à s'accepter et à s'aimer telle qu'elle est, à ne pas vouloir être comme elle pense qu'elle devrait être pour qu'on l'apprécie, etc.
Comment faire pour qu'elle ait envie d'apprendre, pour qu'elle trouve en elle la force de se motiver pour réussir là où elle aura envie de réussir, plutôt que de ne se focaliser que sur le regard des autres, sur l'image qu'elle pense devoir donner pour avoir de l'attention, etc. Car je le vois tout le temps, elle n'a pas beaucoup envie de travailler à l'école, à réviser, avoir de bonnes etc. Mais elle me parle tout le temps de se défriser les cheveux, d'avoir une couleur de peau plus claire, et elle n'écoute jamais aucun conseil que je lui donne... cela a tendance à me désespérer je ne sais plus trop quoi faire, lui dire... et vraiment vraiment réussir à avoir une influence très positive sur elle, avant si possible, la crise de l'adolescence pour que tout ces complexes ne soient encore pires, qu'ils prennent de plus en plus de place dans son esprit et finissent par être les centres de son attention et qu'elle ne pense plus qu'à cela; être aimée, être comme les autres ou comme elle pense que les autres aimeraient qu'elle soit etc...

J'ajoute qu'elle a été diagnostiquée comme étant une enfant ayant un trouble de l'attention... Je ne remets en aucun cas en question le diagnostique d'un professionnel de la santé, mais je trouve que cette maladie est bizarrement souvent diagnostiquée. Je suis principalement un peu contre le traitement que l'on donne à ces enfants, c'est-à-dire des amphétamines, pour qu'ils se concentrent plus facilement. Je suppose que cela est le seul traitement et sûrement également considéré comme le meilleur et le plus efficace, mais je suis sûre qu'il y a bien d'autres bonnes méthodes pour prendre en charge ce trouble, sans avoir à donner directement, avant tout autre essai, ce type de substance... d'autant plus qu'elle est aussi atteinte de crises d'épilepsie, heureusement légères et qui ne nécessitent donc qu'un simple petit médicament une fois par jour il me semble. Ainsi qu'un petit trouble de la démarche et une dyslexie. Avec tout ces troubles et cette situation qu'est la sienne, qu'en pensez-vous?

Quels sont les meilleures méthodes que vous ayez pu appliquer dans l'éducation de vos enfants, ou pour aider un enfant proche adopté à grandir sereinement et à évoluer dans les meilleures conditions possibles??

Merci beaucoup pour votre lecture,

En espérant avoir le plus de réponses qui me permettront d'aider ma petite Lila au mieux!

Sarah :) :D
Adrien45
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Enregistré le : sam. 25 nov. 2023 06:24

Re: Comment rassurer un enfant adopté ..?

Message non lu par Adrien45 »

Bonjour Sarah,

Tout d'abord, je tiens à saluer votre engagement et votre amour pour Lila. Il est évident que vous êtes une source de soutien et d'affection inestimable pour elle. En ce qui concerne les défis auxquels Lila est confrontée, il est important de se rappeler que chaque enfant est unique, et cela est d'autant plus vrai pour un enfant adopté et venant d'un milieu culturel différent.

Pour aider Lila à se sentir plus en confiance et à l'aise dans sa peau, une approche positive et inclusive est essentielle. Célébrez sa diversité et encouragez-la à explorer et à être fière de ses origines. Les activités qui favorisent l'expression personnelle, comme l'art, la musique, ou l'écriture, peuvent être des moyens efficaces pour elle de s'exprimer et de se comprendre.

En ce qui concerne sa dyslexie et son trouble de l'attention, envisagez des méthodes d'apprentissage alternatives. Par exemple, des approches multisensorielles pour la lecture ou des jeux éducatifs qui peuvent rendre l'apprentissage plus interactif et moins stressant pour elle.

Concernant le traitement médical, il est toujours judicieux de chercher des avis médicaux supplémentaires et d'explorer d'autres options de traitement qui pourraient être mieux adaptées à sa situation et ses besoins.

Tout comme une dent transparente serait unique et remarquable, ses différences sont ce qui la rend spéciale et précieuse. Il pourrait être intéressant d'explorer avec elle l'idée que tout comme une dent transparente aurait des aspects uniques et fascinants, ses propres caractéristiques distinctes sont des atouts et non des défauts.

Dans quelle mesure l'adoption d'une approche plus individualisée et créative dans l'éducation et le soutien psychologique pourrait-elle favoriser une meilleure estime de soi chez les enfants adoptés, particulièrement ceux confrontés à des défis supplémentaires comme Lila ?
Patricia01
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Re: Comment rassurer un enfant adopté ..?

Message non lu par Patricia01 »

Bonjour Sarah,
Ce que tu décris chez ta "presque-soeur", c'est assez courant chez des jeunes adoptés. Elle est en 5ème donc est déjà entrée dans l'adolescence, période où le regard des autres et l'envie d'être comme tout le monde est très très forte... et chez un enfant adopté, cette tendance à vouloir être comme les autres a une résonnance particulière, du fait qu'ils sont différents, par leur histoire, par leur couleur de peau, et dans son cas par le fait de ne pas avoir de père, par ses difficultés scolaires... c'est dur à cet âge de se sentir différent et c'est particulièrement fort chez un ado-ado comme les appelle Johanne Lemieux (c'est une psychologue québecquoise spécialiste de l'adoption, je crois qu'elle écrit un livre sur les ado adoptés, et elle fait souvent des conférences). Il faut se rendre compte que pour un enfant adopté, le besoin d'être dans la norme et bien accepté par ses pairs est plus fort que chez un ado ordinaire (parce qu'être différent, c'est risqué d'être rejeté, ce qui va réactiver la peur de l'abandon enfouie dans le subconscient), alors justement qu'ils ne sont pas tout à fait des ados ordinaires. En plus, l'adolescence c'est une période où on questionne les liens familiaux, où on trouve ses parents pénibles, pas à la hauteur, où on fantasme sur d'autres parents possibles... mais pour un ado adopté il y a justement d'autres parents dans leur histoire. Ça fait plein de raison d'être plus mal dans sa peau que la moyenne des jeunes de leur âge (même si on ne doit pas généraliser, il y a des ados adoptés qui ont une adolescence sans difficulté, et des ados non adoptés qui ont de très gros troubles... mais en moyenne un ado adopté a plus de blessures cachées dans son subconscient donc plus de risque de les voir réactivées).

C'est très positif qu'elle exprime être fière de son pays de naissance, car ça signifie être fière de son origine et donc d'une part d'elle-même. Peu importe qu'elle ne connaisse pas son pays de naissance, s'il a de la valeur dans son esprit, alors elle aussi a de la valeur, telle qu'elle est, avec sa couleur et ses cheveux.
Ce serait bien aussi qu'elle parvienne à aimer ses cheveux : il faudrait trouver une coiffeuse afro qui sache lui dire et redire à quel point ils sont beaux et qui ne la pousse pas à les lisser (car certains coiffeurs afro poussent au lissage - c'est plus simple à gérer au quotidien). Ou, à défaut, une personne de couleur dans son entourage...
Ce serait bien aussi qu'elle puisse être en contact avec d'autres ados adoptés (via EFA par exemple, je ne sais pas s'ils font un pique-nique annuel ou autre type de rencontre dans son secteur), pour se sentir moins seule... même si elle arrive à l'âge où elle ne voudra plus y aller.

Pour le reste, à part l'aimer telle qu'elle est et la valoriser au maximum, je ne sais pas ce que vous pouvez faire.
J'avoue de mon côté être assez impuissante avec mon ado de 14 ans (la plus jeune de mes filles) qui depuis la sixième ne pense qu'à se faire belle, être à la mode, comme les copines, totalement accro à son téléphone, et ne fiche rien à l'école (et ne supporte pas que je m'en mêle, ça la met dans des états indescriptibles : que je voie de mes propres yeux qu'elle n'a rien compris en maths, c'est une blessure terrible pour son égo!). Après, je suis prof, donc j'ai fait ce que j'ai toujours conseillé aux familles confrontées à ce problème : travailler l'orientation. Elle a fait des micro-stages, elle a trouvé une voie qui lui plait, et va partir en voie professionnelle... et du coup elle se met à bosser scolairement (enfin... un peu...) pour avoir un bon dossier ! Sauf que maintenant que tout ça est sur le point de se concrétiser, elle change d'avis et ne veut plus aller en pro... Bref. J'essaie de la booster sans trop mettre de pression, l'équilibre est délicat. J'ai, en tant que prof, des élèves en phobie scolaire, d'autres qui se scarifient, qui font de l'anorexie ou autre type de réaction pathologique... et je vois bien que ma fille pourrait très facilement tomber dans l'anorexie (quand elle est contrariée elle refuse de manger)... donc ma priorité c'est qu'elle soit bien dans ses baskets. Pour les études, l'essentiel c'est qu'elle ne décroche pas et qu'elle choisisse une voie, et on trouvera toujours des passerelles, des voies parallèles, si elle veut changer plus tard.
Je ne suis pas forcément un modèle... j'aurais dû la pousser plus à travailler, la priver davantage de son téléphone, mais ça la met dans un tel état, elle a une telle intolérance à la frustration, j'ai l'impression de marcher sur des oeufs... Comme tout parent, je tâtonne, je ne suis pas assez stricte ou trop ceci ou pas assez cela. Mais j'ai vu suffisamment d'ado évoluer dans mon métier pour savoir qu'au bout du compte, ils avancent, ils changent, ils grandissent. Ça m'aide à beaucoup relativiser. Et je suis très optimiste de nature : elle fera son chemin, elle finira sûrement par être moins égocentrique...

Tout ça pour dire que le mieux à faire pour son équilibre, à mon avis, c'est de la soutenir, de lui faire confiance et de lui montrer qu'on a confiance. Valoriser ses succès, la féliciter, lui dire combien elle est forte, combien elle est belle / intelligente / gentille / douce... ou tout autre compliment sincère. L'encourager à faire de son mieux, à aller le plus loin possible, lui répéter qu'elle peut y arriver, l'encourager à trouver des choses qui lui plaisent, l'aider à se trouver des qualités. Il faut être conscient aussi qu'investir la la scolarité comporte un risque inconscient : faire de son mieux et échouer, c'est se prouver à soi-même qu'on n'est pas bon (alors que si on se plante parce qu'on n'a rien fichu, on a une excuse!). J'ai en ce moment une élève adoptée de 17 ans qui est traumatisée par le moindre échec à une interro et se retrouve en phobie scolaire, tant elle se met de pression (car si elle se plante c'est qu'elle est "nulle"... donc ne mérite pas d'être aimée... tout ceci étant bien sûr inconscient). C'est pour ça que je parle d'équilibre difficile à trouver.

Quant au trouble de l'attention : oui, on en diagnostique souvent, et en particulier chez des enfants adoptés, qui ont eu diverses ruptures dans leur petite enfance et ont souvent eu des manques qui ont pu conduire à un trouble du développement (pendant la petite enfance ou intra-utérin). Le diagnostic, en général, n'est pas fait à la légère : pour mon ainée qui a ce type de traitement, on avait eu 2 ans d'attente avec divers examens et tests avant d'avoir un diagnostic. Le traitement qu'elle a ne peut être prescrit que par un neuropédiatre hospitalier. Il n'induit aucune dépendance (mais a certains effets secondaires lourds, je trouve) et il est extrêmement efficace : on voyait immédiatement la différence, elle pouvait se poser, se concentrer, avoir une conversation suivie. C'était notre seul espoir qu'elle parvienne à apprendre à lire (mais ça n'a pas suffi). Avec l'âge, l'effet devient moins spectaculaire, elle a appris à compenser son trouble de l'attention, donc on réduit peu à peu, elle ne le prend que les jours où elle a le plus besoin de concentration; mais quand elle était petite, clairement il était indispensable (elle était incapable de garder son attention sur un sujet plus de quelques dizaines de seconde). En fait, ce type de traitement devrait systématiquement être accompagné d'un suivi psychologique ou autre pour apprendre à gérer son trouble de l'attention : une fois que l'enfant est capable de compenser son trouble, on peut le réduire voire le supprimer... mais ce moment n'arrive souvent qu'à la fin de l'adolescence.
Dans le cas de cette petite Lila, je pense qu'il peut aussi y avoir un effet psychologique, il peut lui donner confiance : avec le médicament elle réussit mieux, c'est un peu une béquille, elle ose mieux essayer quand elle le prend.
Bref, s'il n'y a pas d'effet secondaire inquiétant, il faut faire confiance au médecin... mais ne le prendre que le strict nécessaire et la préparer au fait que c'est transitoire, qu'un jour elle apprendra à s'en passer.

C'est tout ce qui me vient.... bref pas grand-chose à part que finalement tout ça est assez normal... et qu'elle a bien de la chance d'être aussi bien soutenue par sa grande cousine!
Patricia, maman de deux grandes filles chocolat et miel (Ethiopie/Vietnam) de 17 et 13 ans, arrivées à 1 an
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