Témoignage d'une mère adoptive : difficultés et émotions

[Celineh2o]

Je souhaite partager mon expérience de maman adoptante, pour exprimer une difficulté que je viens tout juste d'identifier, et m'en libérer.

Nous avons adopté notre fils à l'âge de 3 mois, il y a 6 ans et demi maintenant. Ce fut un grand bonheur bien sûr, et tout notre entourage s'est joint à nous pour vivre cette grande joie.

Mais ce ne fut pas que facile, et j'ai gardé en moi pendant très longtemps tout un tas d'émotions qui m'ont comme "saisie" à ce moment-là, et m'ont empêché de vivre sereinement et pleinement les premières années de mon fils.

Ces émotions furent la peur, l'angoisse, le sentiment de ne pas être à la hauteur, de ne pas être reconnue comme la maman. Toutes ces émotions se sont cristallisées au fond de moi, et je n'ai pas su les exprimer, par honte ou par gêne. Le sentiment que les autres ne comprendraient pas.

Elles furent liées à plusieurs choses. L'arrivée de l'enfant, en très peu de temps finalement, moins d'une semaine entre l'annonce, et l'arrivée à la maison. L'organisation logistique à mettre en place à la maison, l'annonce au travail que je venais tout juste d'obtenir...

Puis, notre fils a été malade tout de suite, dès le premier jour de son arrivée à la maison, avec une bronchiolite, et nous avons du courrir le week-end chez le médecin, puis chez le kinesithérapeute avec ses massages de tortionnaire. Cette maladie s'est révélée être chronique, et notre fils a grandi en alternant bronchiolite, bronchite asthmatiforme, etc..

Je n'avais que deux mois de congé maternité, pendant lesquels j'ai du chercher le mode de garde pour mon fils : démarches à la mairie pour la crèche sans succès, recrutement de nounous, rencontres de familles pour garde partagée, etc.... Tout cela dans l'angoisse et la crainte de ne pas trouver la solution...
Notre fils n'étant pas de la même couleur de peau que moi (contrairement à son père), j'ai également du faire face aux regards interrogatifs, voir aux interrogations du genre "vous n'êtes pas la vraie mère, c'est ça ?" ou "mais c'est votre fils, comment cela se fait-il ?" etc....

au final, je n'ai pas eu de vrai temps pour moi et pour lui, tranquille, et sereinement, à son arrivée, pour prendre nos marques, et j'ai repris le travail épuisée, et frustrée, avec toutes ses émotions refoulées, car il fallait bien faire face.

Cela a crée au fil du temps une tension intérieure, puis une difficulté à respirer, à me sentir bien et apaisée. Je mets tout juste des mots là dessus aujourd'hui, 6 ans après, et je sens que cela me soulage et me libère d'en parler. L'accompagnement et l'aide des mères adoptives devraient être développés.

Notre fils va très bien et grandit bien, et c'est une belle expérience que nous vivons. Mon témoignage est plus en lien avec ce que vivent les mères adoptives, et qui ne savent pas où trouver de l'aide adapté.

Merci pour ce forum

[gagatte]

Merci beaucoup pour ce temoignage plein de sensibilite Celine, sur vos debut en tant que maman et toutes les emotions qui vont avec. Pour beaucoup de mamans, adoptives ou non, il est parfois difficile d'en parler, tant il y a une sorte d'obligation sociale a etre une jeune maman comblee et heureuse tout de suite...

Plein de belles choses a vous trois, et encore merci

[Celineh2o]

Merci beaucoup Gagatte pour votre message !

[TPE4]

Bonjour, nous sommes 3 élèves du lycée Jean-monnet de Cognac. Nous travaillons pour les TPE qui sont une épreuve du bac sur l'adoption et nous voudrions savoir si vous souhaitez en parler, comment c'est déroulé l'adoption dont vous parlez. Les procédures et les difficultés que vous avez rencontré. merci d'avance.

[puceetloups]

Bonsoir,

votre message est un peu ancien déjà mais je voulais vous dire que vous n'êtes pas la seule à vivre de telles difficultés, loin s'en faut. Et elles sont souvent très difficiles à dire alors bravo pour votre courage.
Je travaille sur la dépression post adoption qui ressemble beaucoup à celle du post partum, avec ce sentiment d'incompétence à l'égard de l'enfant et cette culpabilité envahissante... Et cette difficulté parentale est le plus souvent tue mais mérite d'être connue, non pour que les parents, adoptifs ou non, s'attendent au pire, mais pour qu'ils sachent que cela existe et que ce n'est pas hors norme de vivre ces difficultés.
Vous parlez d'accompagnement et je souhaite travailler en ce sens dans mon mémoire. il existe des consultations spécialisées pour l'adoption, à Paris mais aussi ailleurs en France. Si jamais vous aviez besoin d'en parler davantage, vous pouvez sans doute vous adresser à ces lieux.

[mamantriste06]

Bonjour , je voudrais raconter ici brievement notre parcours , nous avions adopté un petit garçon en 2009 qui est mort lors du tremblement de terre en Haiti , peu de temps aprés un autre petit nous a été attribué QUI RESSEMBLE COMME DEUX GOUTTES D'EAU à "son grand frère " ce petit garçon se trouve avec nous depuis le 23 decembre 2010 ; mais hélas malgré tout mes efforts je n'arrive pas à l'aimer, je m'occupe de lui , le lave ; l''habille... Mais je ne suis vraiment bien que lorsqu'il sort avec son père .Je commence à voir une psy qui me rassure et vos témoignages aussi et maintenant...

[frédérique]

Bonjour , je voudrais raconter ici brievement notre parcours , nous avions adopté un petit garçon en 2009 qui est mort lors du tremblement de terre en Haiti , peu de temps aprés un autre petit nous a été attribué QUI RESSEMBLE COMME DEUX GOUTTES D'EAU à "son grand frère " ce petit garçon se trouve avec nous depuis le 23 decembre 2010 ; mais hélas malgré tout mes efforts je n'arrive pas à l'aimer, je m'occupe de lui , le lave ; l''habille... Mais je ne suis vraiment bien que lorsqu'il sort avec son père .Je commence à voir une psy qui me rassure et vos témoignages aussi et maintenant...

bonjour,
c'est une saine démarche que celle que vous avez entreprise auprès d'un professionnel ;
l'arrivée de votre enfant est un peu particulière du fait qu'elle se soit faite après le décès d'un 1er enfant et aussi sans doute
dans les conditions particulières d'arrivée des enfants d'haiti;
sans doute faudra t il du temps pour faire le deuil de ce 1er enfant ...
donez vous aussi du temps pour "apprivoiser" votre garçon arrivé il y a juste un mois !
quel âge a t il ? commet réagit il lui ? lui avez vous parlé de cet enfant décédé ? quel que soit son âge, je pense que vous devriez le faire ; ainsi il comprendra que vous soyez perturbée;
bon courage

[Cloclo]

bonjour,
c'est une saine démarche que celle que vous avez entreprise auprès d'un professionnel ;
l'arrivée de votre enfant est un peu particulière du fait qu'elle se soit faite après le décès d'un 1er enfant et aussi sans doute
dans les conditions particulières d'arrivée des enfants d'haiti;
sans doute faudra t il du temps pour faire le deuil de ce 1er enfant ...
donez vous aussi du temps pour "apprivoiser" votre garçon arrivé il y a juste un mois !
quel âge a t il ? commet réagit il lui ? lui avez vous parlé de cet enfant décédé ? quel que soit son âge, je pense que vous devriez le faire ; ainsi il comprendra que vous soyez perturbée;
bon courage

Il n'est pas certain que lui parler de cet enfant décédé soit une bonne chose. En effet, cet enfant est assez perturbé par son passé et son déplacement.
Ensuite, il risque de comprendre qu'on attend de lui de ressembler ou remplacer l'enfant décédé. Ce qui le perturbera encore plus. Parlez-en avec votre psy, mais il me semble qu'il déconseillera ce risque de transfert.
Bon courage néanmoins et patience

[JClaude]

Je transmets la réponse d'une adoptante qui n'a pas eu le temps de s'inscrire.

Bonjour , nous avions adopté un petit garçon en 2009 qui est mort lors du tremblement de terre en Haiti , peu de temps aprés un autre petit nous a été attribué QUI RESSEMBLE COMME DEUX GOUTTES D'EAU à "son grand frère " ce petit garçon se trouve avec nous depuis le 23 decembre 2010 ; mais hélas malgré tout mes efforts je n'arrive pas à l'aimer, je m'occupe de lui , le lave ; l''habille... Mais je ne suis vraiment bien que lorsqu'il sort avec son père .Je commence à voir une psy qui me rassure et vos témoignages aussi et maintenant...

Bonjour , votre témoignage m'a émue, car je me suis retrouvée moi aussi avec des sentiments difficiles lors de l'arrivée de mes enfants :
- sentiment d'incapacité à assumer mon rôle pour la naissance de mon premier garçon fait maison ;
- sentiment de peur, même de dégoût devant ma première fille adoptive en allant la chercher dans son orphelinat de Roumanie : elle sentait mauvais, était sale et et avait des croûtes du cuir chevelu ;
- sentiment d'être complètement dépassée et de ne pouvoir assumer lors de l'adoption de ma deuxième fille de 8 ans arrivant d'un pays d'Asie.

Or, je peux témoigner que les sentiments ne sont pas statiques, ils évoluent en permanence. Je me suis appliquée à tenir mon rôle de maman, apportant comme vous le faites les soins indispensables, et ouvrant mon esprit et mon coeur à cet enfant étranger ( même bio il est un étranger à découvrir) qui devenait ainsi progressivement mon enfant.
C'est la constance dans les soins, la découverte progressive des besoins de l'enfant et de sa façon spécifique de réagir, l'écoute attentive de ses souffrances, de ses capacités, de ses qualités et défauts, qui a fait germer en moi cette petite graine de l'amour. L'amour pour un enfant ne naît pas de suite, car un enfant qui arrive nous déçoit toujours un peu par rapport à l'image idéale que nous nous étions forgée de lui. Mais c'est dans les interactions quotidiennes avec lui, dans les soins qu'on lui porte que la petite graine de l'amour peut germer. J'ai 4 enfants qui sont adultes maintenant et je peux témoigner que pour chacun un amour très spécifique s'est développé. 4 grand rosiers, de couleur différente, pourraient symboliser l'amour que j'ai ainsi construit pour chacun, malgré les ambivalences de mes sentiments.

Peut être cela vous aiderait de bien séparer dans votre tête, l'amour que vous vouliez donner à ce premier enfant décédé et celui que vous allez construire avec celui ci présent. Et pourquoi pas planter un rosier pour chacun ? Mais surtout ne prenez pas les mêmes couleurs, chaque enfant mérite un amour unique et spécifique.
Vous êtes bien partie car vous avez le courage de parler et de vous faire aider. Je vous souhaite de bonnes plantations !

Une maman devenue grand mère

[Patricia01]

Courage...

Le lien mère-enfant, ça met du temps à se construire. Mais du temps, vous en avez, vous avez des années devant vous, alors donnez-vous le temps, même si c'est dur car on culpabilise, après tant d'attente (peut-être l'attente trop longue y est-elle pour quelque chose, d'ailleurs)....
Ce qui compte, vous le savez sans doute, pour l'attachement de votre enfant, c'est tous les petits rites, la régularité dans les journées, dans l'ordre de ce qu'on fait, dans les rituels familiaux ; c'est qu'on devine ses besoins et qu'on y réponde; le but c'est qu'il parvienne à se sentir, petit à petit, en sécurité. Ca prend du temps. Et pendant ce temps, doucement, vous allez, l'apprivoiser, le découvrir, et finir par l'aimer.
Une bonne chose d'aller voir un psy, il vous aidera peut-être à trouver le petit truc qui coincer...
Bon, je ne vous apprend sans doute rien, et je n'ai vécu ce genre de symptôme que pendant quelques jours avant de découvrir d'un coup ce qui me bloquait, donc je ne peux sans doute guère vous aider. Mais surtout ne baissez pas les bras, avec le temps ça va s'arranger!